Rencontre avec Michel Cavarroc
"Quand on est d’ici, ça tient, il a dit. Moi Figeac, je la porte en moi. Dès qu’on gratte un crépi, derrière on tombe sur la pierre, l’histoire ».
Je lui ai demandé quels étaient ses endroits préférés et, avec la tranche de ses mains, sur la table, pour quadriller une ville imaginaire, il m’a indiqué « la rue Balène, celle qui part de la rue Ortabadial, elle est toute petite, elle fait cent mètres, elle est un peu déviée et il y a une mamie qui met des plantes tout le long. Et la rue Bonhore. Parce que comme elles sont piétonnes, sans les voitures, tu peux être n’importe quel siècle. »
Je venais d’arriver à Figeac. C’était beau d’entendre quelqu’un parler de sa ville, sans en avoir moi d’images encore. Une ville faite de noms et de mains sur une table.
J’ai aperçu un magazine intitulé Vieux. Il a dit « Oui, le nom m’a fait sourire, Vieux. C’est un nouveau. Je vais le garder pour le filer à un copain qui fait la collection des numéros 1 ». Il l’a ouvert pour me montrer la phrase du poète Yvon Le Men : « Ils se sont tellement aimés que la mort recula d’une heure pour les laisser passer ». Je lui ai demandé si lui-même écrivait de la poésie. « Jeune oui. J’appelais ça l’aspirine du cœur. Contre les malheurs d’amour. Aujourd’hui, j’en lis encore, mais pour le plaisir. Et puis, on arrive à un âge où tout s’apaise ». Il avait 78 ans. « Je m’estime chanceux d’être bien, physiquement, il a dit ». Et j’ai ajouté : oui, et mentalement, aussi. Il a confirmé : « c’est ça qui tient le reste ».